Les Bangles, c'est un moment important pour un jeune ado qui découvre la puissance des hormones.
Pardon, je reprends.
Les Bangles, c'est un moment important pour un jeune ado qui découvre la musique. Pensez donc : des filles talentueuses qui font du rock, que demander de plus ?
Né en Californie au tout début des années 80, le groupe composé de Susanna Hoffs, de Michael Steele, et des soeurs Debbi et Vicki Peterson a réalisé pendant la décennie trois albums, une petite série de tubes et de magnifiques brushings avant de se dissoudre à l'orée des années 90. Je n'ai pas l'impression qu'en Europe, le groupe ait été particulièrement connu ou célébré. Sans doute les rangeait-on un peu vite ici dans la case des éphémères faiseuses de hits, mais pour le mélomane attentif, elles étaient un peu plus que ça. Les Bangles pratiquaient une musique portée d'un côté par un classique trio batterie-basse-guitare, de l'autre de solides harmonies vocales. Elles jouaient de leurs propres instruments, et toutes chantaient (même si Susanna Hoffs étaient davantage mise en avant par les compteurs de billets verts). Les Bangles pratiquaient aussi une musique solidement ancrée sur des racines un peu garage rock (les Runaways de Joan Jett ne sont pas très loin), et un peu pop sixties façon Beatles. Tout cela donnait un répertoire qui, une fois ramené comme ici à sa quintessence, ne manque ni de mélodie, ni d'envie d'en découdre. Au moment de leur séparation, est en effet publiée la compilation qui fait l'objet du présent billet, une sorte de cadeau d'adieu (on est alors en 1990). Certes, une bonne dizaine d'années après, le groupe des Bangles s'est reformé, mais j'avoue que je ne me suis pas vraiment penché sur cette partie de leur carrière (par ailleurs plutôt confidentielle). Un jour peut-être, qui sait... En attendant, moi, j'aimais bien le clip loufoque de Walk Like an Egyptian et j'aimais bien l'ambiance crépusculaire d'Eternal Flame. Et donc quand est sortie cette anthologie, quelle belle occasion ce fut de replonger dans ces chansons.
Le disque se présente dans un jewel case tout ce qu'il y a de plus traditionnel. La pochette est illustrée par un bizarre collage à l'esthétique aujourd'hui un peu désuète. Déjà pour l'époque, j'avoue que ça avait l'air un peu bâclé. Je suppose que cette compilation est à l'image des efforts que la maison de disque étaient encore prête à faire pour une cause probablement jugée perdue. On a donc les quatre visages des membres du groupe, un peu de travers, devant un grand spaghetti pourpre sur un fond noir/mauve avec un cercle gris en bas à gauche qui doit – je l'imagine – figurer la Lune. Bref, sans être laid (les couleurs vont plutôt bien ensemble), ça n'est évocateur de rien ; du design eighties un peu creux, mais heureusement sobre. Le livret se déplie en quatre volets, avec les indications techniques (composition des chanson, détails de production), une grande photo du groupe et un court texte de Mark Rowland retraçant leur histoire. Le CD lui-même n'est pas décoré, abordant simplement la mise en forme des disques CBS de l'époque (on a vu la même sur le CD de Lonnie Johnson discutée ici il y a peu).
On compte 14 chansons sur le disque. Les albums Different Lights (1986) et Everything (1988), ceux qui connurent le plus large succès, fournissent la plus grande partie de cette sélection (avec respectivement cinq et quatre titres). Toutefois, une place est faite aussi aux petites raretés de rigueur dans ce genre d'exercice : un titre inédit, une face-B, un « single » utilisé dans une musique de film. En fait, ce qui interpelle le plus, c'est que le disque est finalement assez court : 49 minutes seulement. Rétrospectivement, même selon les standards de l'époque, je me demande si ce n'est pas un peu limité. Un choix plus ambitieux concernant les titres des débuts aurait rendu la compilation plus représentative et plus copieuse. Mais quoi qu'il en soit, les grand tubes de référence y sont. Je pense à Manic Monday, Walk Like an Egyptian et Eternal Flame, ou encore leur reprise survoltée de Hazy Shade of Winter de Simon & Garfunkel. Cependant, bien que peut-être moins connu, le reste ne dépareille pas du tout. Ma préférence va particulièrement à Hero Takes a Fall (un de leur premiers titres), Following (une ballade acoustique magnifiquement déprimante), Everything I Wanted (un rock furieux) et I'll Set You Free (une touchante chanson de rupture qui me donne à chaque fois quelques frissons). Dans l'ensemble, la compilation se laisse écouter sans temps mort. Les voix californiennes sont à la hauteur de leur réputation, les guitares Rickenbacker mordent les enceintes plus souvent qu'on ne l'imaginerait.
Le son du CD est clair et correct, sans être d'une pureté décoiffante. Je trouve qu'il sonne aussi un peu étroit, qu'il manque d'espace, mais c'est assez peu de chose, et puis c'est un son d'il y a plus de trente ans aussi, d'une époque où l'on ne « remasterisait » pas encore à tour de bras. Les voix sont bien mises en avant dans le mixage, mais il n'y a pas de recherche particulière pour donner à ces enregistrements une signature très particulière ou originale (texture, ambiance, couleur) ; c'est proprement compétent, c'est tout. Cependant il n'y a pas cette froideur synthétique que l'on trouve parfois sur les disques des années 80s ; les Bangles ont assez de caractère pour que ça transparaisse à l'écoute, que ça fasse « humain » et pas « machine ».
Il s'agit ici d'un de mes plus anciens CDs. Pas le premier que j'ai jamais eu, mais il fait partie certainement des dix premiers disques compacts à avoir franchi le seuil de ma maison. Je le ressors de loin en loin et l'écouter suscite toujours un petit émoi nostalgique pour cette réjouissante musique, pour cette époque où l'on découvrait ce nouveau support numérique, pour les yeux de Susanna Hoffs...
C'est tout pour aujourd'hui. Portez-vous bien et écoutez de la musique.
Pour les curieux, référence discogs :
https://www.discogs.com/fr/Bangles-Greatest-Hits/release/1142112
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