Le nouvel album de Kings of Convenience

Après les avoir vu traverser la première décennie du XXIème siècle sur la pointe des pantoufles, je croyais qu'on avait définitivement perdu la trace des Kings of Convenience. Quelle ne fut donc pas ma surprise de voir annoncer un nouvel album pour le mois de juin, presque douze ans après leur précédent opus... Histoire de favoriser une juste rétribution des artistes, j'ai directement commandé le disque sur le site du groupe norvégien, c'est pourquoi j'ai reçu l'objet un mois et demi après tout le monde. Il y a sûrement un détail logistique qui m'a échappé. Quoi qu'il en soit, le voici !


Il m'est arrivé sous la forme d'un très transparent « jewel case », mais il était possible de l'obtenir dans un étui cartonné, en vinyle ou même en cassette. Les pochettes des albums des Kings of Convenience montrent toujours des photos très travaillées et élégantes, et celle-ci ne fait pas exception. Le livret contient les paroles des chanson, quelques photos, les informations légales. Mention spéciale pour le papier utilisé : il est très doux au toucher, c'est un peu étrange, mais agréable. Bref, un objet décent.

Comme d'habitude ce sont les deux membres du duo, Eirik Glambek Bøe et Erlend Øye, qui s'occupent du chant et des parties de guitares, ce qui constituent l'essentiel de leur approche de la musique. Toutefois, on trouve aussi la présence discrète d'autres musiciens manipulants basse, percussion, alto, et même viole de gambe. La chanteuse canadienne Leslie Feist, déjà présente sur le deuxième album du groupe, vient poser sa voix sur deux plages. Enfin, je note un grand nombres de personnes responsables de l'enregistrement, du mastering ou de la production, ce qui me fait imaginer que la production a du s'étendre sur une période de temps assez longue, parcourant différents studios, mobilisant différentes équipes ; ça n'a donc pas pris 12 ans pour rien.

Le disque est plutôt court, en tout cas c'est le plus court de leur catalogue : 38 minutes, 11 plages. Quant au contenu, je crois qu'aucune personne déjà familière du son du groupe ne sera fondamentalement dépaysée. Kings of Convenience pratiquent avec brio un pop-folk doux et acoustique, posé, presque paresseux, un peu mélancolique et contemplatif, mais en même temps léger, simple et désuet. Cette ambiance cotonneuse, cette spontanéité sont d'abord affaire d'apparence. On devine tout le travail nécessaire pour atteindre cette sorte de minimalisme qui est davantage celui de la méticulosité, de « la bonne note au bon endroit » et du « pas une note de trop » que, par exemple, celui d'un bluesman penché sur sa guitare cassée, crachant en un seul jet sa rengaine devant sa cabane perdue sur les rives du Mississippi.

Les chansons se succèdent sur un mode plutôt calme ; les titres que l'on pourrait qualifier de « rapides » sont de toute manière rares ici. Les voix ne s'énervent jamais et ça sent bon le bois, celui des instruments, comme celui du feu devant lequel on s'imagine volontiers une tasse de thé à la main. La présence d'une vois féminine vient apporter un petit plus rafraîchissant.

Les textes des chansons tournent autour des rapports entre les êtres, des histoires d'amour généralement terminées, de la mélancolie et du temps qui passe, avec beaucoup d'apostrophe à la deuxième personne envers quelqu'un qui n'a pas l'air d'être là. Il faut bien avouer que ce n'est pas un univers de franche rigolade et les moments lumineux sont souvent accompagnés d'un voile de désillusion, d'un arrière-goût de relative tristesse. Cela dit, avec ce registre, avec ce groupe, on reste en terrain connu.


C'est beau comme un catalogue Ikea...

Le son du disque est impeccablement propre, sans la moindre parcelle de lourdeur, mais sans froideur non plus. Le partage de l'espace entre guitares et voix est joliment équilibré. On pourra peut-être regretter plus de variété, plus de prises de risque dans les couleurs sonores ; une guitare acoustique, finalement, d'une plage à l'autre, sonne toujours comme une autre guitare acoustique.


Il n'y a rien de radicalement révolutionnaire donc, ni à l'échelle de la musique pop, ni à l'échelle de la carrière du groupe, mais après tant d'années, ce sont tout de même des retrouvailles agréables. Les Kings of Convenience sont toujours capables de créer cette ambiance zen qui est devenue leur marque de fabrique, et ce malgré les cailloux sur la piste.

C'est tout pour aujourd'hui. Portez-vous bien et écoutez de la musique.

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