Ouais, je sais, ce
titre est pourri, mais c'est l'émotion...
Tom Petty, je vous en ai déjà parlé, vous savez que je le considère comme un très grand artiste. Vous savez aussi qu'il est malheureusement trop tôt disparu. Comme il arrive souvent dans des cas similaires, les ayants-droits ouvrent les coffres, exploitent le catalogue, rendent publics de nouveaux enregistrements. On avait déjà eu droit il y a quelques années à une édition augmentée de son album Wildflowers. Cette année, c'est sur une série de concerts captés il y a un quart de siècle que les archivistes se sont penchés.
Nous somme au tout début de l'année 1997. Dans la discographie de Tom Petty, on est après la publication de Wildflowers et de la musique du film She's the One. Un peu perdu à cette époque, désireux de se ressourcer, de retrouver une forme de plaisir simple de jouer de la musique, Tom Petty et son groupe décident de donner une série de concerts au Fillmore de San Francisco. C'est une salle plutôt petite, accueillant à peine un peu plus de mille spectateurs, et ce sera donc parfait pour retrouver une ambiance de club rappelant les débuts de carrière, de renouer avec l'ambiance chaleureuse d'un public réduit, mais motivé, loin des stades sans personnalité qui font trop souvent le quotidien des artistes rock à partir d'un certain niveau de succès. Au final, c'est une vingtaine de représentations qui seront données, devant des salles combles d'ailleurs, avec beaucoup de liberté. Tom Petty est ses musiciens font évoluer les setlists fréquemment, s'amusent à intégrer de nombreuses reprises, à accueillir occasionnellement quelques invités venus jouer avec eux. Les six derniers concerts de la séries (entre le 31 janvier et le 7 février) ont été enregistrés professionnellement et servent de base à la présente publication. Il existent une grosse édition de cinquante-huit titres en quatre CD, mais j'ai modestement opté pour la plus économique édition deux disques : trente-trois chansons tout de même, presque deux heures et demie de musique.
L'objet se présente sous la forme d'un étui en carton avec trois volets : un disque de chaque côté avec le livret collé au milieu. Le dessin de la pochette montre une image à dominante orangée dans un style un peu « Grateful Dead ». J'avoue que si ça va bien avec le nom « Fillmore » et tout ce qu'il évoque pour la scène psychédélique des années soixante, je ne trouve pas l'ensemble particulièrement joli (surtout les petits visages autour du dessin principal). On va dire que ça passe, mais sans plus. Le livret inclut un long texte signé Joel Selvin racontant dans le détail cet épisode scénique particulier dans la carrière de Tom Petty ainsi que de nombreuses photographies, et se termine par les habituelles indications techniques et légales. C'est produit par Ryan Ulyate et Mike Campbell, deux collaborateurs de longue date de Tom Petty, le second étant aussi quasiment son guitariste attitré. Et c'est publié chez Warner, la maison de disque en charge du catalogue de l'artiste à partir de Wildflowers.
Il ne s'agit pas ici de représenter un unique concert en particulier. C'est davantage d'une anthologie qu'il s'agit, où la succession des titres suivrait plus ou moins l'organisation des setlists de l'époque. Le choix opéré laisse un peu de place à quelques grand classiques (American Girl, Listen to Her Heart), mais privilégie surtout les productions récentes – enfin, récentes... par rapport à 1997 bien sûr, des titres issus des albums des années proches (Full Moon Fever, le Greatest Hits de 1993, Wildflowers ou encore She's the One). Les reprises surtout occupent une place prépondérante sur ces deux disques. Tom Petty et ses Heartbreakers rendent hommages aux tubes de leur jeunesse puisés chez une grande variété de groupes et d'artistes : Chuck Berry, Little Richard, les Rolling Stones, Bob Dylan, les Kinks, JJ Cale, Bill Withers,...
Parmi les grands moments que je retiendrai, je note une excellente reprise de Call Me the Breeze, avec des improvisations au piano et un beau solo final.
De manière général, c'est un grand plaisir de découvrir les chansons de Wildflowers sur scène, particulièrement You Don't Know How It Feels où Tom Petty joue avec le public et You Wreck Me qui percute magnifiquement bien.
J'aime beaucoup aussi, dans la foulée du toujours magnifique Angel Dream, tout le passage avec des versions ultra dépouillées de The Wild One et d'American Girl.
A noter également quelques fascinantes collaborations : le catalogue des Byrds revisité avec Roger McGuinn et un blues aussi moite que frénétique (Boogie Chillen) avec John Lee Hooker.
Enfin, le morceau de choix, c'est immanquablement ici la fabuleuse version de dix minutes de Mary Jane's Last Dance. On est à genoux.
Tout du long, l'enregistrement fait transparaître une agréable décontraction. Les musiciens se sentent à juste titre chez eux, le public est conquis, l'ambiance est chaleureuse. Le savoir-faire de Tom Petty et de son groupe n'y est pas pour rien ; ces instrumentistes aguerris connaissent leur bréviaire rock par coeur et passent avec aisance d'un répertoire à l'autre, mêlant tous ces titres divers en un tout finalement assez homogène. A cette époque, Les Heartbreakers sont composés des inamovibles Mike Campbell (guitare) et Benmont Tench (claviers), mais aussi de Howie Epstein (Basse) et Scott Thurston (guitare, harmonica). Le petit nouveau, façon de parler puisque c'est alors déjà un musicien de studio expérimenté, c'est le batteur Steve Ferrone (qui remplace Stan Lynch), mais il s'intègre parfaitement à l'ensemble et restera d'ailleurs avec le groupe jusqu'à la fin.
Et ce qui ne gâte rien, la prise de son est excellente. Tout apparaît avec suffisamment de netteté et d'espace, sans sacrifier à l'intimité de l'atmosphère. Chaque instrument est clairement audible et les réactions du public sont perceptibles sans être envahissantes.
Quoi qu'il en soit, le contenu de ces deux CDs s'écoute avec immense plaisir, par la qualité proposée et par la joie de réentendre Tom Petty. Si vous connaissez le coffret The Live Anthology paru en 2009 (où d'ailleurs figuraient déjà quelques titres enregistrés au Fillmore), vous serez en terrain connu. Cette nouvelle publication pourrait se fondre sans problème dans la précédente, en termes de cohérence et de qualité.
En conclusion, ce disque est définitivement un document essentiel pour tout fan de Tom Petty. Je le recommande chaudment.
C'est tout pour aujourd'hui. Portez-vous bien et écoutez de la musique.
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