Remis en perspective par rapport aux artistes que l'on a ou aura l'habitude de voir par ici, Black Pumas apparaîtra comme un groupe très récent. Il s'agit plus précisément d'un duo, constitué d'Eric Burton et d'Adrian Quesada. Ces deux bonshommes commencent à travailler ensemble à partir de 2017 et publient un premier album en 2019. C'est un très bon premier album d'ailleurs – et certainement aurais-je un jour l'occasion d'en parler ici – , et un album qui m'a surtout donné envie de suivre un peu la carrière du groupe, d'apprendre l'arrivé prochaine d'un nouvel opus (le vingt-sept octobre, figurez-vous) et de me le procurer aussi tôt que possible. Le voici, il s'intitule Chronicles of a Diamond. Regardons, écoutons.
(Gros soupir...) Un étui en carton bien dans l'air du temps, deux volets, l'un contenant le disque, l'autre le livret. L'esthétique de la pochette est assez sombre : beaucoup de noir, avec des détails, des rehauts ocre/or, rouge ou encore blanc diamant (une référence au titre, je présume). On retrouve le thème des deux félins symétriques initié avec le premier album. Des photographies, en couleurs ou en noir et blanc, garnissent l'intérieur. La grande photo noir et blanc se retrouve sur le livret. Bon... quand je dis « livret », c'est un peu inexact ; il s'agit en fait d'un bout de papier plié en trois. Peu de blabla dans ce livret, de même que sur cette pochette : les titres des chansons, des indications techniques, des mentions légales,... La décoration du CD lui-même, c'est simplement du noir avec quelques détails en ocre. Il y a dix plages, ça dure quarante-trois minutes et c'est publié/distribué chez ATO records et PIAS, tout comme le disque précédent.
La musique des Black Pumas, c'est chaud et confortable. Ce dernier terme est à prendre dans le meilleur sens possible : on est tout de suite mis à l'aise, tout de suite séduit, tout de suite au diapason d'un groove serein, mais entêtant. Les univers soul ou r'n'b ne sont pas ceux qui me sont les plus familiers, alors je risque de dire des bêtises, mais tant pis. J'avoue que c'est un style que je trouve parfois surchargé, étouffant. Même si des mélodies peuvent me plaire, j'y atteins assez vite une forme d'indigestion. Ici en revanche, je trouve en général tout beaucoup plus assimilable, bien plus en tout cas que ce que je perçois (même superficiellement) ailleurs. Il y a une légèreté (faute d'un meilleur terme) qui me va très bien. Black Pumas, c'est un style que j'ai parfois vu qualifier de « psychedelic soul » et ma foi... pourquoi pas... Oui, il y a parfois des effets hypnotiques, une attitude nonchalante et un peu « intoxiquée », mais sans excès, sans délires embarrassants. Les morceaux sont agréablement habités par la guitare élégante de Quesada, discrète, mais fiable, avec intelligence et sans esbroufe, tandis que la voix de Burton apporte une jolie couleur, un timbre spécifique finissant de donner une belle identité au répertoire. Quoi qu'il en soit, moi, j'ai trouvé ici un tempo, une atmosphère, un son qui me plaisent.
Les nouvelles chansons s'inscrivent plutôt bien dans les lignes posées par le premier album : ça chaloupe, ça berce, ça remue (dans tous les sens du terme), mais parfois ça monte dans les aigus pour explorer toute l'amplitude du son et parfois aussi ça percute un peu plus. C'est joyeusement mélodique par moment, sans complexe, un peu paresseux, mais toujours compétent. More Than A Love Song propose une introduction parfaite, on traîne au soleil, on joue un peu de guitare, on claque des doigts, et le voyage peut commencer. La décontraction se poursuit sur les morceaux suivants, mais Chronicles of a Diamond (avec son final inquiétant où la voix reste tandis que les instruments d'effacent) et Angel amènent une gravité qui donne un peu de contraste. La palette des émotions continue de se déployer, alternant ambiances cotonneuses plus épaisses (Tomorrow) et rythmes plus nerveux et délicatement électriques (Sauvignon). Un mot peut-être encore sur Hello et Rock And Roll qui se présentent comme les tentatives plus visibles de sonner un peu autrement. Sans aller jusqu'à utiliser le qualificatif d'expérimental, ce sont clairement les morceaux les plus différents (dans une certaine mesure), peut-être les moins convaincants aussi, même si on pourra saluer l'envie de s'aventurer en d'autres territoires.
De manière étonnante, on ne trouve nulle part les noms des musiciens. On se doute que Quesada et Burton doivent s'occuper eux-mêmes d'une partie des instruments, les guitares et quelques claviers sans doute, mais pour le reste ? Surtout, par exemple, les choeurs féminins ? C'est un peu dommage de ne pas savoir qui fait quoi... D'autres éléments sont mieux documentés. On voit ainsi que le duo se partagent les crédits d'écriture, avec une plus grande implication de Burton par rapport à l'album précédent. Quesada, fidèle à son poste de producteur principal, continue de diriger les sessions en poussant les boutons et en tirant les manettes. Les enregistrements semblent avoir été plutôt dispersés, le livret cite plusieurs studios, ingénieurs du son, mixeurs,... À aucun moment on ne semble s'être assis au même endroit en même temps pour faire le disque du début à la fin ; tout a été fait ici ou là, au gré des circonstances, un peu comme si l'on avait travaillé sur le (futur) album au gré des trous dans les agendas des uns et des autres. Bon, hé, c'est pas bien grave non plus. On portera au crédit de Quesada que ça sonne tout de même comme un tout cohérent, avec une identité propre, et pas comme un album-Frankenstein. Enfin, j'aurai une remarque à faire sur le son. Les Black Pumas restent grosso modo fidèle à leur signature sonore, plutôt chaude et relax, mais le mastering a fait les frais d'une assez sensible et malvenue compression. Ce qui sur le disque précédent donnait un côté léger et ajoutait à leur texture volontiers rétro a disparu au bénéfice d'un son un peu plus commun et surtout plus fatigant. Pourquoi ? C'était intéressant en 2019 de trouver un CD produit avec une attention un peu démodée, mais respectueuse, pour le beau son et les subtilités dynamiques,... Dommage.
Les Black Pumas reviennent donc et, après un formidable premier album, ils poursuivent leur petit bonhomme de chemin sans décevoir, à défaut de proposer des conquêtes nouvelles. Ce n'est toutefois pas non plus un même sillon labouré deux fois, le duo tente des petites explorations dans l'écriture. C'est une sorte d'évolution qui prend son temps, à l'image de leur musique, tranquille (parfois moins) et humblement traditionnelle (mais avec un petit truc en plus).
C'est tout pour aujourd'hui. Portez-vous bien et écoutez de la musique.
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